vendredi 2 novembre 2012

Arret maladie

On peut être jeune et être déjà tombé amoureux. Avoir vécu des expériences multiples et singulières. Des amourettes naïves, quand on connaissait pas le mode d'emploi. Et puis, des déceptions qui valent pour toute une vie.

J'ai l'impression que la mienne file en accéléré, empilant les existences comme on empile les mottes de foin, écrasées par le poids des années. Je ne sais pas si c'est en rapport avec mes sens exaltés et mes émotions crues. Ou si c'est juste mère nature qui s'est acharnée avec les pots de peinture penchée sur mon berceau à saturer mon monde en couleur et intensité. Je ne peux pas savoir si, techniquement, je respire plus fort que les autres.

Ce n'est qu'un ressenti.

Certains se transforment parfois en certitude.
Celle d'avoir trouvé l'homme de notre vie.
Qui s'en va la faire ailleurs.
Ça reste.
Qu'il puisse se marier si jeune.
Histoire de bien anéantir l'espoir.
Même celui qui ne fait de mal à personne, logé au chaud dans nos inventions romanesques.
Je n'ai jamais eu que cette certitude là je crois.
Eh bien ça t'apprendra, tiens.

Evidemment, les rêves se foutent allègrement de ce qui est possible ou non de réaliser.
Alors ils continuent à rendre cela crédible, les renouements, les happy end. Et le matin, je les engueule et leur mets des mauvaises notes.
Eux, ne comprendront jamais la leçon.

Il y en a bien eu, des leçons retenues. Sur les mensonges, les jalousies et colères excessives, les dépendances, les excès. Les départs, les retours incertains, les jeux d'emprise, de séduction et les illusions. J'ai encaissé, souvent en silence, avant de pouvoir mettre quelques mots dessus. J'ai aussi essayé un paquet d'alternatives, ne voulant jamais recommencer deux fois la même histoire. J'ai couru après des amours non partagées, des amours en pointillé, simulées, insinuées, j'ai couru après des amours rendues, des amours tendues, teigneuses, destructrices et passionnelles, fusionnelles, improbables, délectables, uniques, parfaites, trop parfaites. J'ai couru après l'amour.
Et parfois, je l'ai rattrapé.

J'ai aussi couru après les rêves et les fantasmes. J'en ai rendu palpables quelques-uns. J'en ai également aperçu la limite. De mes envies, de ce dont j'étais capable. De ce que je voulais faire ou ne pas faire, vivre ou ne pas vivre. De ce que je ne voulais pas subir, ni faire subir à autrui. J'ai pu observer où se trouvaient mes libertés. Et même si elles restent à l'intérieur d'un cadre, il est très, très vaste.

Alors, il faut garder espoir, et aller de l'avant.
Malgré les déceptions et la crainte que l'inconnu nous ravage. Même si certaines couleurs s'estompent avec l'âge. Je ne suis plus une enfant. Il m'est difficile de sauter à pieds joints dans l'amour et les opportunités sans tenir compte du chemin parcouru et des différentes menaces. Mon coeur s'est refermé lentement pour chaque coup ascéné. Aujourd'hui, il n'est plus qu'une boule sur laquelle gisent les cicatrices.
Mais j'ai confiance. Une fois que les croûtes seront toutes tombées, comme neuf, il pourra à nouveau se déplier sans que cela ne le fasse souffrir.

Les douleurs mal digérées ne prennent jamais de jours de congés.
Heureusement, les cadeaux de la vie et petites joies qui réchauffent non plus.
Il suffit d'accepter de trimballer son gros sac bourré de vécu avec soi, le bon comme le mauvais.

Et un jour, le larguer sur la route.

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