vendredi 30 novembre 2012

Egarer les cartons à remplir

Ça y est. J'ai oublié la fougue de ses gestes.
Les creux de son visage qui s'enfonce en ma chair.
Quatre jours pour faire d'une palpitation vive un moment incertain.

Il en faut peu.
J'ai même perdu cette envie mystérieuse qui m'aurait fait dire oui pour une balade à n'importe quelle heure de la nuit. Qui m'aurait fait flancher pour un bout de lèvre, un bout de joue, un bout de nez, à croquer dans la pomme.

A la place, j'écris dans mes toilettes pour encore une semaine et adieu cette vie nouvelle qui m'aurait bousculé l'esprit.
Je ne pars pas en Australie.
Parce qu'il n'y aura sûrement plus personne pour m'y accueillir.
Parce que c'est fini la vie de couple et qu'on est tous soulagés.
Que j'étais tellement bien seule que c'en était pesant pour les autres.

Mais.
Je ne veux pas rentrer chez moi dans la France d'en bas.
D'en bas du sud.
Je préfère le sud d'à côté.
Celui que je n'ai plus envie de quitter.
Habiter seule.
Habiter seule?
Sans travail autre que la musique potentiellement?
Sans ancrage.
Sans lui.
Mon garçon des étoiles.
Il est déjà parti.
La tête ailleurs.

Il pensait probablement qu'il n'aurait jamais à décider pour nous deux.
Pourtant, c'est à lui que je laisserai le mot de la fin.

mardi 27 novembre 2012

Redite

Le 26.11.12 à 19h40

Voilà, c'est dit et expédié.
"Nos au revoir, ce serait presque ce que je préfère."

J'aime les gens qui ont cette spontanéité là de serrer dans les bras.
Lâcher les rampes de métro et risquer de trébucher d'ivresse.
J'aime la force qu'il déploie à m'empoigner l'échine, j'aime qu'il courre dans les escaliers tout en haut pour m'y attendre, me tendre une embuscade, se sauter à la gorge, se renverser à deux en se tenant très fort entre nos cœurs, c'est comme s'il débordait d'amour sincère et désintéressé lorsqu'il a attrapé ma tête pour me baiser le cou à tel point que je ne sais plus si je lui plais en tant que femme ou en tant qu'être.
J'étais loin de m'imaginer, encore une fois, enfoncer mes doigts dans ses côtes, à en perdre l'équilibre, pour ensuite m'élancer, à en perdre le souffle, jusqu'aux quais, rentrer dans le premier wagon le cœur battant la chamade et rester bloquée un instant, pensive, silencieuse, ne pouvant croire à autant d'amour à la fois, déversé sur une presque inconnue, c'est tombé sur moi la chance, en dépit des circonstances, un geste salvateur mettant de côté les questionnements concernant un futur proche ou lointain enfin, un lendemain.

Peu importe aujourd'hui les décisions capitales.
Elles peuvent attendre un jour ou deux, le temps que je m'en remette.
Sauf que selon les dires, ce soir c'est le grand soir.

Irrelevant

Le 23.11.12 à 17h54

Le temps est allongé comme le Starbuck café.
Retrouver des vieilles connaissances.
S'ennuyer.
Les mots qui veulent sortir ne sont pas de circonstance.
Mon envie d'évoquer son prénom.
Irrelevant.

Les gens ont arrêté de se passionner pour une histoire sans fin ni palpitation, ni retournement de situation depuis plusieurs années déjà. Et le jour où il y aurait matière à argumenter.
Ils restent passifs.
Peu interloqués.
Blasés.
Tout comme moi.

Je n'ai pas envie de rencontrer tout son monde, me présenter à ses amis, sa famille pour la première fois, si c'est pour dans trois semaines qu'il parte sans moi et retour à la normale, les efforts de sociabilisation inutiles alors que j'ai pas le moral à sourire hypocritement.
Pour quoi faire?
Ces gens là, j'ai une chance sur deux de ne plus jamais les revoir.
A quoi bon. Je suis lassée et ai abandonné l'espoir.
Que peut-il m'arriver de bien?

Tout le reste, sûrement.
Il suffit de prendre le temps de regarder hors de soi et s'en réjouir.
Mais pour cette histoire là, je n'en ai plus la force.

Je végète, stoïque, dans la file d'attente, prête à entendre ma sentence.
Ou pas prête, peut-être.
Je ne sais pas.
L'impression soudaine que toute ma vie va me tomber entre les bras.
Comme une pluie de briques.
Les briques, ce sont mes larmes.
Pour chacune, des fleuves, des torrents d'eaux boueuses.
Qui ne s'écoulent pas.
Cernés par les barrages de ma lassitude.

Vite, que l'on passe au plan suivant, que la roue tourne et qu'on conclue l'histoire.

Qui de l'homme ou du chanteur

Allez, c'est reparti pour un tour et comme en quarante.

Je me repasse en boucle ses vidéos sur mon ordinateur essayant d'en tirer quelque chose. Un souvenir commun, ou partagé. Ses nouvelles chansons résonnent comme des réminiscences de conversations récentes et j'aime sur scène le voir exploser d'un charisme inné. Je suis tombée amoureuse du chanteur je crois il y a deux ans de ça. De son visage qui s'illumine sous les couleurs des projecteurs.

En vrai, sa trogne n'a pas le même éclat.
En vrai, il n'est pas si drôle. Il est même un peu lent, et sa voix est enrouée.
Il est bavard. Sans forcément être des plus intéressants, même s'il l'est. Il touche une profondeur frileuse dans ses réflexions pures et même s'il n'est pas dans l'erreur ne palpe que le concret de l'humain et ça lui convient.
Il n'est pas éclatant, ni même extravagant, il garde ses émotions pour lui la plupart du temps. Même s'il tend à être sincère. Même s'il aime les gens, ne peut s'empêcher de ne pas aimer ce qu'ils construisent de leurs propres mains, a la critique facile et l'estime peu haute. Les mœurs légères bien malgré lui. Le sourire facile, la colère étouffée remplacée par la froideur perceptible de l'être.
En vrai, il dégagerait presque une fadeur tiède qui dissuaderait plus d'un curieux.

Il y a deux ans de ça, je suis tombée amoureuse du chanteur, pas de l'homme.
Je me suis éprise du rêve qu'il projetait sur l'écran de mes rétines. De la situation magique engendrée par la rencontre matérialisée d'un prince tout droit sorti de mes contes de fées.

Aujourd'hui il est là, de plain-pied, et il n'est plus un prince.
Il est lui.
Et ça m'aurait suffit à tourner la page.
S'il n'avait pas intercepté mon cœur au creux de ses bras.
S'il ne m'avait pas transmis son amour simple sur la courbe de ma nuque.
S'il n'était pas si généreux dans ses émotions, dans ses actes, par explosions soudaines.
Je n'aurais pas cru qu'il pouvait donner autant en si peu de gestes.
Je suis encore touchée par la pureté de son sentiment.
De sa neutralité, rare.

C'est comme ça qu'il est en émoi alors?
Mais c'est magnifique.
Tellement juste.
Modeste.
Que j'aurais envie d'apprendre l'homme, même si je connais l'histoire par cœur.
J'aurais envie d'étudier avec lui cette finesse du tremblement de l'âme qui trouve en l'autre sa résonance.
Je suis émue.
Par l'être, seul.

Et quand je visionne ses passages concert pour me rappeler, le chanteur fait la grimace et l'homme me manque. Impossible à rabibocher, les bouts d'images, de personnalités tangentes qui s'effacent plus les informations s'empilent, s'amoncellent lorsque s'impose à moi son art, s'esquive timidement celui qui m'a confié ses envies, ses doutes et ses douleurs, qui a lâché tout ancrage pour me rendre l'étreinte.
Très vite, les souvenirs s'effacent.
Au point qu'il n'est plus si évident d'avoir partagé conjointement les mêmes intensités.

Il faut alors accepter que le soufflé retombe.
Que les liens se distendent.
Pour un jour, peut-être, se renouer.
Un jour qui n'est pas demain.

Au revoir

Je n'ai pas vomi cette fois-ci, mais c'est peut-être parce que je n'avais rien avalé non plus.
Mon idole de chanteur, une deuxième fois juste avant mon départ. C'est une histoire de trains qui ne se ratent pas, à ma grande malchance.
La veille, je revoyais cet autre ami musicien aussi qui le connaissait depuis plus de dix ans.
Il me le confirmait : oui, elles tombent toutes amoureuses.
Sur son passage, comme des mouches.

Je n'ai pas été épargnée je le sais. Je le chante le jour, je le rêve la nuit, cela fait trois années qu'il me fascine pudiquement, deux qu'il m'a brulée les pupilles publiquement depuis que j'ai voulu l'approcher de trop près sans visière à l'émoi, au coup de foudre. Bim, dans ce troquet charmant, malade des poumons, du foie, du cœur à sa rencontre, mes organes lâchent prise, subjugués par l'homme en face ils en oublient leur travail, et moi l'option parole.

J'avais appris à m'y résoudre.
Jusqu'à mercredi dernier je crois.
Huit heures à son crochet et ne plus en démordre.
Aujourd'hui, de dix-sept à dix-neuf, entre deux rendez-vous, il se déplace jusqu'à l'Eglise Ste Eust*che.
Que pouvait-on se dire après avoir autant parlé quelques jours plus tôt, qu'avait-on encore à se raconter?
Etonnamment, on trouve toujours.
C'est le fait simple de sa présence qui ravit les cœurs.
Qui les ravive.

A dix-neuf heures moins dix, mon idole de chanteur s'est affolé à ma place.
Entre Chat*let et la gare, il n'y a qu'un seul arrêt. Mais lui comme moi ne sommes pas des doués des bouches de métro alors il s'applique et demande, me mène d'un pas pressé qui me fait sourire dans son dos lorsque je tends à le rattraper. Nous nous courrons après dans les tunnels interminables de la ratp, il s'enlève le bonnet il a le cheveu qui pointe, il m'attendrit, malgré la vitesse, il est petit et frêle et habillé comme un plombier il me fait craquer de toute sa gentillesse et son implication réservée.

Entrés en trombe dans le wagon il remarque qu'il s'est trompé de sens pour son prochain rendez-vous. L'espace d'une station on souffle de s'être un peu stressés mutuellement. Il me reste moins de huit minutes pour arriver à bon quai. Je lui dis au revoir dans la rame histoire de prendre de l'avance sur ma prochaine course, il me serre dans ses bras comme la dernière fois mais cette fois-ci je lui rends l'étreinte, alors il lâche la barre pour ne se tenir qu'à moi, attaque cardiaque, pourvu que le métro ne freine pas. Rester debout en déséquilibre, immobiles ou presque alors que tout avance, et se désentrelacer progressivement, sans un regard, fixer le sol ça dure une plombe, la proximité outrageante de ces corps un instant trop intimes.

Les portes s'ouvrent, nous descendons d'un pas accéléré, je trace devant pensant que les au revoir avaient déjà été consumés mais il me double dans les escaliers et tout en haut m'y attend "pour me dire au revoir".
Il faut savoir.
Dans le feu de l'action et cette folie des minutes qui ne cessent de s'écouler au fond du sablier nous finissons par nous rentrer dedans, se sauter au cou sans demi-mesure, s'agripper de toute la force d'une tendresse sans retenue, au point d'un peu danser légèrement sur les deux pieds, les gens autour de nous s'agitent sans nous bousculer, le temps par charité nous accorde un sursit de quelques secondes. Alors il m'étreint de plus belle lorsque entre deux respirations il enfouit sa tête dans mon cou son baiser sur ma nuque ma colonne qui frémit d'audace à m'en faire frétiller les cils, je ne l'imaginais pas si fougueux et entier, si coriace, je me sens portée, léviter, légère, débarrassée d'un poids lorsque nos yeux se croisent une véritable fois, emplie d'un sourire qui déborde de mon visage lorsque je lui souffle la mine comblée mon dernier "au revoir" avant de m'éclipser dans le mouvement de foule, disparaître de la surface de la planète et maugréer en silence enfouie dans mon siège sur le départ ces instants qui s'éloignent en même temps que mon train file jusqu'à la prochaine gare.



vendredi 23 novembre 2012

Illusoire

Alors que je l'informais que pour moi c'était 50/50, une chance sur deux de me faire larguer avant le grand voyage, lui me parlait de sa copine qui lui avait fait les parties piano de son nouveau disque en se frottant le front "enfin, ma copine, je ne devrais plus l'appeler comme ça". Quatre ans la durée de l'histoire, et trois mois qu'il est célibataire. Elle veut revenir, parce qu'ils s'étaient quittés bêtement, sur une résignation commune.
Elle voulait un enfant.

Et moi. Deux mois depuis cet instant où je vois mon garçon des étoiles m'annoncer "je ne sais plus si je veux que tu m'accompagnes" "tu sais, si tu tardes à me rejoindre, un mois, deux mois, ce sera peut-être trop tard". Le laisser y réfléchir tout seul et se sentir moins emprisonné, l'entendre au téléphone s'exclamer de joie "aujourd'hui, j'ai fait ci et ça, ceci et cela, j'ai créé continuellement, c'était génial" "j'ai fait tellement de choses que je n'arrive pas à faire quand tu es là", ça me laisse sans voix. Perplexe. Blasée.

De toute façon, je suis blasée.

Quand j'y repense. J'étais tellement bien toute seule.
Je le suis encore.
J'aime ces moments où je ne rejoins personne.
Alors pourquoi?
Pourquoi se forcer?
Je l'ai choisi lui, parce qu'il avait la flamme. Mais elle s'estompe si vite.
Illusoire.

Je suis blasée. Peu importe l'issue de ce drame. Et s'il me laisse le vide aux bras, le rien entre les doigts. L'absence d'être, de ville, de chez soi, d'appartenance. L'absence de projet et d'avenir. La remise à zéro subite pas du tout négociée. J'avais tout misé sur toi. T'avais tout pour qu'on soit heureux et c'est pour ça que je t'ai choisi, t'ai demandé du temps, pour apprendre à cultiver l'amour qui n'en était qu'à germe, même si j'avais espoir. Et l'âme d'une jardinière consciencieuse.

Mais à la place, c'est toi qui baisse les bras.
Fuck.
J'avais fini par m'imaginer partir sur tes terres australiennes, moi qui porte encore en moi le cadavre de mes anciennes projections malheureuses. Peu importe.
Finalement.
Peu importe.
On peut anticiper, parer aux éventualités mauvaises.
Se protéger comme on peut.
C'est toujours pareil.
C'est juste que ça arrive plus tard.


Le décalage.
Le déséquilibre du sentiment que l'on se partage.
On peut pas une fois être sur la même dose d'émoi ensemble, au même moment, et s'en contenter.
C'est bien trop compliqué.
Même lorsque l'on agit avec prudence.
Alors fuck.

J'aurai essayé un tas d'approches différentes, tenter de se fouler le cœur le moins douloureusement possible.
Au final, il n'y a pas plus d'amour.
Au final, c'est la même bouse dans laquelle on se plante, qu'on voit venir de loin, loin, sans pouvoir bifurquer, juste, arrêter le moteur. Descendre de la bagnole.
Se casser hors des emmerdes.

J'étais bien moi toute seule!
J'voulais juste pas d'une histoire sans lendemain.
D'une moitié de relation accomplie.
J'voulais construire quelque chose.
Quitte à un peu se forcer la main.
Parce que c'est pas dans nos habitudes.

Alors, il me suffirait de retourner à mon état initial.
Marcher le long des rues les yeux dans les nuages, des airs de mon idole de chanteur en tête, semi amoureuse, semi rêveuse, ça fonctionnait très bien avant. Ça ne faisait de mal à personne. Les mots me venaient naturellement, remplir mes carnets à images et fantaisies multiples, produire l'idéal de ma vie dans mes espaces creusés d'inspirations nocturnes et de temps en temps, lui écrire des déclarations à n'envoyer sous aucun prétexte. L'introvertisme prude de mes envies déliées.

Assis dehors à grelotter un peu sur la terrasse de ce bistrot parisien, mon idole de chanteur et moi on se rejoignait sur la même conclusion intime. On est bien, juste avec soi. Besoin de rien d'autre. Libre d'explorer les horizons. Tout en se serrant fort contre nos cœurs, chercher à se revoir.
Je suis bien, seule.
Je suis bien, avec toi.
Et c'est comme si ça ne faisait aucune différence.

jeudi 22 novembre 2012

Le coeur valser dans le tourniquet

J'ai eu beau m'imaginer un nombre incalculable de fois cette journée parfaite dans son ensemble, touche par touche, poser les ingrédients de la farce qui la rendent exquise, me repasser le film de mes fantasmes à travers la vitre du métro, je n'aurais pas pu imaginer cela se concrétiser sous toute sa forme. Mon rendez-vous idéal avec mon idole de chanteur.

Après toutes ces années d'abstinence expressive, de soupape émotionnelle jamais prête à s'ouvrir, c'était maintenant. C'était tout ce que j'attendais.
Un moment simple.
Un échange, sans pudeur.
Sans retenue.
Parler d'amour. Qu'est-ce que j'en avais envie. Parler d'amour avec celui qui pour moi l'inscrit par ses notes en mes oreilles, au quotidien.
Se confier. Se raconter nos expériences. Se partager nos idées et lubies, nos prises de conscience.
J'ai aimé ce type sans le connaître, sans savoir.
A en vomir ce matin, avant de le voir.
Dans tout mon corps, être affectée par la rencontre, comme s'il était question de vie ou de mort.
Alors que bon.

C'est absurde, et je l'admets. Et j'en rirais volontiers.

Quinze heures, et avec une demi-heure de retard. Mais il avait amené les mignardises.
Jusqu'à minuit devant le tourniquet.

Marcher longtemps. Traverser Paris. Se tromper. D'itinéraire. Dévier les sujets. Sans se regarder. Ne pas s'épiler l'âme trop fort.
L'entendre dire qu'il me trouvait belle.
Se raconter nos timidités respectives.
Mettre en scène ses râteaux et mauvais coups du sort, ses efforts pour y aller plus franco retombés à l'eau.
Un homme attendrissant.
Pourtant.
Il n'a pas mâché ses mots pour s'excuser de ne pas m'inviter chez lui.
"Je t'aurais bien hébergée ce soir, mais ma colloc a organisé une fête avec des gens un peu cons et dedans il y a cette amie de mon ex, ce serait maladroit de t'amener avec moi surtout que tu aurais dormi dans mon lit."
Un homme paradoxal.

Est-ce parce que je lui ai avoué trouver cela étrange et non naturel que le premier contact intime avec l'être qui nous plait se fasse par l'intermédiaire du baiser?

Toujours est-il que devant la bouche du métro, il a tenu à m'accompagner, descendre les marches pour inévitablement les remonter je me suis moquée de lui en lui signifiant l'absurdité des gestes mais peut-être voulait-il seulement se donner l'élan. Me demander combien de temps je restais encore sur la capitale, s'accorder à penser que c'était un chouette moment, surprenant, et après les bises de convenance, me glisser un sourire agrémenté d'un "merci pour tout" avant de m'entourer de ses bras quelques instants, respirer dans son torse, se caresser l'échine à travers nos six épaisseurs de vêtements et repartir vite fait à nos vies d'accoutumances, sans se retourner, le cœur valser dans le tourniquet, la tête ailleurs, trembler devant les quais, redescente rapide d'une réalité rêvée devenue rêve réalisé.

J'ai encore du mal à m'y faire.

lundi 19 novembre 2012

Papillon noir

Danser à poil chez soi sur du Bl*ck L*ght Orchestra, c'est ça la vie.
Un regain d'énergie.
Et la nostalgie qui s'immisce comme une squatteuse d'ambiance.

Alors j'ai pris la plume du bout des doigts, rompre une page blanche de cinq années immenses.
Je lui ai écrit qu'il était un cadeau.
Parce que les gens se doivent de savoir, lorsqu'ils apportent réconfort à autrui, à quel point ils peuvent être doux et utiles en cette période de froid glacial dans les cœurs.
Parce que, de là où il est, il en a peut-être besoin.
Besoin qu'on lui rappelle des évidences.

J'ai écrit à ce Mr Oblique comme si l'on s'était quitté hier à la porte du garage d'où sortaient des airs manouches reprisés à la sauce Miguel. Une époque d'insouciance. Un bonhomme tombé de nulle part, et surtout d'Ecosse, son chapeau melon en poche, sa clarinette sous le bras, un charme british d'une grande école. Des histoires à dormir debout, comme il est si doué pour les raconter. Et un rendez-vous, jamais honoré, autour d'un piano d'un magasin de musique dans une de ces rues animées par une joie désordonnée.
Si j'avais su franchement, que je ne le reverrais plus.
J'aurais fait l'effort, je crois.
Honte à moi.

Il n'est peut-être jamais trop tard.

jeudi 15 novembre 2012

Allez viens, on arrête d'être cons

Depuis que nos peaux se sont frôlées pour de bon, je rêve de lui toutes les nuits. Les matins je cogite. Quelques heures, j'émerge de ces aventures lumineuses.
Je ne sais pas trop comment me positionner dans cette affaire.
Si je dois laisser tomber, ne plus perdre de temps à ça.
Si je dois persévérer, comme un investissement sur l'avenir.
Et qu'un jour, mes efforts me profitent.

J'ai eu envie plusieurs fois, vraiment, de passer mon tour. D'abandonner mon espoir sur une aire d'autoroute. Ça fait bientôt trois ans maintenant et je m'étais dit que l'émoi finirait par s'essouffler comme une fatalité.

Parce qu'il peut bien être celui que je brûle de connaître.
Il en reste mon chanteur préféré.
J'aurai beau l'effacer, l'oublier, le mettre dans un coin, il ne disparaîtra pas. Il s'immiscera entre mes tympans, se fredonnera en ma mémoire. Il sortira tous les deux ans un nouveau disque et c'est si con de se priver d'une telle musique pour un seul homme. Bon, en l’occurrence, celui qui la façonne.

Que faire?
Je m'en vais peut-être pour une année dans un pays dont il est étranger.
Imaginer ne pas lui parler un temps si prolongé m'achève un peu.
J'aurai toujours ses chansons accrochées à mes oreilles alors, ce n'est pas comme si nous allions très loin l'un de l'autre.
Mais si, quand même.

Comment lui dire?
Je voudrais saisir cette dernière chance. Cesser de faire l'enfant et défoncer ses murs. Allez viens, on arrête d'être cons. On laisse la timidité de côté et on se dit vraiment ce qu'on a à se dire, depuis tout ce temps. On range nos statuts respectifs et on se jette sans filet, sans entrave à l'expression. On s'ouvre, juste. Parce que c'est forcément par là que tout commence.

Alors, pourquoi n'y sommes-nous pas encore?

mardi 13 novembre 2012

A deux doigts

Le 11.11.12 à 02h17

Malgré les intempéries et les bottes ruinées par la boue, les marches loupées les jeans déchirés, malgré l'appréhension des échecs successifs, le cœur noué par l'attente et les regrets, il y eut sa main.
Enfin.
Ses doigts chauds et chaleureux rencontrant le glacé de ma paume. Un choc thermique d'une douceur extrême. D'un réconfort infini et soudain qui embauma mes doutes. Le clin d’œil de la fin me dévoilant l'happy end alternative, si jamais elle put être pour moi. C'était comprendre que cet entremêlement là de doigts, ce n'était pas si loin et improbable et qu'ensemble, ils créaient quelque chose.

D'eux-mêmes.
De leur propre initiative.

Ça me soulagea du poids de l'amour impossible.
Savoir que sa peau avait été acceptée sans rejet de greffe, et qu'il n'avait pas bougé, pas émis l'ombre d'un sursaut, même si ne nous le cachons pas ce sont nos âmes qui ont frémi en secret, en silence, qu'il accepta mon geste, simple, spontanné.
D'ailleurs je me suis étonnée toute seule, ça ne me ressemblait pas.
Soutenir de ma main la sienne en dérobant une part de sa tatin, cela pourrait paraître anodin, mais en deux ans d'existences communes, nous ne nous étions jamais osés à nous toucher de la sorte, mélanger nos effluves.Trop de pudeur.
Trop de respect peut-être.
Et timidité mal placée.
Trop d'orgueil.

Ici, je n'ai plus rien à perdre.
Je sais déjà que tu n'es pas à moi.
Que je suis à un autre.
A deux doigts de partir.
Deux doigts.
Posés sous cette tarte.

Qui tendent encore à caresser l'espoir.

samedi 10 novembre 2012

Rouge gorge, comme la braise

En relisant de vieilles conversations je tombe sur des fragments qui résonnent :

"Merci
un jour j'essaierai de te remercier dignement
mais pour l'instant je peux pas
j'y arrive pas
mais sache au moins que j'aimerais bien le faire."


C'était il y a six ans.
Depuis, j'attends toujours qu'un jour, il s'exécute.
J'attends son merci qui vient du cœur.
Même si, en écrivant cela, il a déjà fait tout le trajet.
Jusqu'au mien, c'est certain.

Je me dis que c'est loin tout ça. Qu'on était jeunes. Quand je me remémore les rencontres et les gestes, ils étaient insouciants, vifs, audacieux et illogiques. Irréfléchis. C'était quand on voulait simplement impressionner l'autre par nos talents pas naturels, et qu'on s'essayait à l'exprimer. Sans la contrepartie en tête. On avait peur bien sûr, pour des trucs bateaux qui aujourd'hui nous feraient rire en nous émouvant un peu. Alors on tournait autour du pot, en se chamaillant de tout ce qu'on pouvait. Avec toutes nos tripes, se les lancer à la gueule. S'éclabousser le visage des couleurs de nos entrailles.

Mais je ne me souviens pas avoir aimé quelqu'un de cette manière. Si jouissive. Vivante.
Cette attirance, elle prenait parti de l'ardeur de la jeunesse.
M'y replonger dans tous ses textes, c'est comme palper un cœur rigide.
Un souffle posthume d'une histoire vite oubliée.
Pour l'autre, bien sûr.
Pour l'autre.

Et ce soir, lorsque je soulèverai le drap, il y aura luisant comme un astre mon garçon des étoiles blotti tout contre la place qu'il me tenait au chaud. Je le regarderai un instant dormir, le sourire attendri et je lui caresserai le visage en lui murmurant tout un tas de superlatifs. Alors, encore dans son rêve, il embrassera l'air pour répondre à la tendresse. Il fait toujours ça. Des baisers dans le vide.

On ne peut pas comparer toutes les histoires.
C'est parfois une peine inutile.
C'est parfois même incomparable.
Le temps, les contextes et les prises de conscience.
Le chemin parcouru.
Seulement, de temps en temps, il m'arrive d'avoir l'impression qu'en sachant moins de choses, j'en comprenais plus.

mercredi 7 novembre 2012

Dédale

J'aime cette ville.
Enfin, j'aime surtout y être.
Marcher dans ses rues. Ça m'émeut.
Je suis émue. Par ce simple geste.
A ma portée, je pourrais être heureuse en sortant tous les jours.
Je pourrais devenir émotive.
Je commence à penser pouvoir y appartenir.
En faire un chez moi.
Un séjour.
Mais il va falloir partir.
A peine le temps d'en faire un désir concret, qu'il faut déjà le céder.
L'appartement.
Le cocon d'amour.
Je n'ai pas envie de partir.
Je n'ai pas envie de partir.
Encore un peu.
Accordez-moi pleinement ce temps qu'il me reste.

dimanche 4 novembre 2012

Jour polaire

Il est encore deux heures et demi du matin sans que j'aie pu y faire quoi que ce soit.
Il est rare que je puisse avoir autant de temps avec moi-même, sans accro ni surprise alors. Je chasse le sommeil. Je dormirai une prochaine fois. Me dis-je toutes les fois.

Il faudrait franchement des journées de 26 heures.
28, même.
Pour les grasses matinées.

Ça doit pas être trop compliqué à mettre en place. On pourrait préparer une pétition. Qu'on remettrait ensuite à un cosmonaute qui s'envolerait dans sa fusée, un astronaute de la poste, la délivrer au soleil et à la lune, leur demander gentiment de décaler d'une heure ou deux leur levée quotidienne respective. Ça ne leur ferait aucune différence à eux, à part pimenter un peu leur routine plan plan établie depuis la nuit des temps. Pas plus de travail qu'à l'accoutumée. Après tout, comment peut-on compter les heures supplémentaires sur une éternité ou presque?

Ah oui. J'oublie souvent que le temps d'ici a une forme très humaine, adapté à son environnement proche. Les montres et autres calendriers. Ce sont tout de même des inventions fabuleuses, qu'on utilise depuis pratiquement toujours. L'heure. Alors que chaque pays vit sa propre saison, son propre climat, sa propre culture, alors qu'au même moment le soleil se couche à l'ouest pour les uns et se lève à l'est pour les autres, que pour d'autres, rares, perchés tout en haut, il se repose au même titre que ceux pour qui, perchés tout en bas, il brille avec insistance, alors que certains fêtent le nouvel an en janvier, certains en février, certains rentrent en classe en septembre, certains en avril, qu'il y en a qui n'ont ni nouvel an ni rentrée scolaire, tous, me semblent-il, tous possèdent l'heure.
Tous possèdent le temps.
Ils n'ont peut-être pas du temps à eux, ni même pour eux.
Mais ils l'ont, dans la forme brute.

Chacun sait qu'il est le milieu de journée lorsque le soleil est au dessus d'eux. Instinctivement, je crois.
Je me demande bien comment se déroule une vie quand on approche un pôle. Se plient-ils aux montres des hommes qui ont fait le cycle, ou s'allongent-ils avec les jours?

J'en reste subjuguée.
Cet état de captivation intense m'ensuque un peu.
En même temps, vu l'heure...

samedi 3 novembre 2012

Calcul mental

Je parviendrai peut-être à tenir un rythme de vie régulier lorsque les jours compteront 26 heures.

vendredi 2 novembre 2012

Arret maladie

On peut être jeune et être déjà tombé amoureux. Avoir vécu des expériences multiples et singulières. Des amourettes naïves, quand on connaissait pas le mode d'emploi. Et puis, des déceptions qui valent pour toute une vie.

J'ai l'impression que la mienne file en accéléré, empilant les existences comme on empile les mottes de foin, écrasées par le poids des années. Je ne sais pas si c'est en rapport avec mes sens exaltés et mes émotions crues. Ou si c'est juste mère nature qui s'est acharnée avec les pots de peinture penchée sur mon berceau à saturer mon monde en couleur et intensité. Je ne peux pas savoir si, techniquement, je respire plus fort que les autres.

Ce n'est qu'un ressenti.

Certains se transforment parfois en certitude.
Celle d'avoir trouvé l'homme de notre vie.
Qui s'en va la faire ailleurs.
Ça reste.
Qu'il puisse se marier si jeune.
Histoire de bien anéantir l'espoir.
Même celui qui ne fait de mal à personne, logé au chaud dans nos inventions romanesques.
Je n'ai jamais eu que cette certitude là je crois.
Eh bien ça t'apprendra, tiens.

Evidemment, les rêves se foutent allègrement de ce qui est possible ou non de réaliser.
Alors ils continuent à rendre cela crédible, les renouements, les happy end. Et le matin, je les engueule et leur mets des mauvaises notes.
Eux, ne comprendront jamais la leçon.

Il y en a bien eu, des leçons retenues. Sur les mensonges, les jalousies et colères excessives, les dépendances, les excès. Les départs, les retours incertains, les jeux d'emprise, de séduction et les illusions. J'ai encaissé, souvent en silence, avant de pouvoir mettre quelques mots dessus. J'ai aussi essayé un paquet d'alternatives, ne voulant jamais recommencer deux fois la même histoire. J'ai couru après des amours non partagées, des amours en pointillé, simulées, insinuées, j'ai couru après des amours rendues, des amours tendues, teigneuses, destructrices et passionnelles, fusionnelles, improbables, délectables, uniques, parfaites, trop parfaites. J'ai couru après l'amour.
Et parfois, je l'ai rattrapé.

J'ai aussi couru après les rêves et les fantasmes. J'en ai rendu palpables quelques-uns. J'en ai également aperçu la limite. De mes envies, de ce dont j'étais capable. De ce que je voulais faire ou ne pas faire, vivre ou ne pas vivre. De ce que je ne voulais pas subir, ni faire subir à autrui. J'ai pu observer où se trouvaient mes libertés. Et même si elles restent à l'intérieur d'un cadre, il est très, très vaste.

Alors, il faut garder espoir, et aller de l'avant.
Malgré les déceptions et la crainte que l'inconnu nous ravage. Même si certaines couleurs s'estompent avec l'âge. Je ne suis plus une enfant. Il m'est difficile de sauter à pieds joints dans l'amour et les opportunités sans tenir compte du chemin parcouru et des différentes menaces. Mon coeur s'est refermé lentement pour chaque coup ascéné. Aujourd'hui, il n'est plus qu'une boule sur laquelle gisent les cicatrices.
Mais j'ai confiance. Une fois que les croûtes seront toutes tombées, comme neuf, il pourra à nouveau se déplier sans que cela ne le fasse souffrir.

Les douleurs mal digérées ne prennent jamais de jours de congés.
Heureusement, les cadeaux de la vie et petites joies qui réchauffent non plus.
Il suffit d'accepter de trimballer son gros sac bourré de vécu avec soi, le bon comme le mauvais.

Et un jour, le larguer sur la route.