lundi 5 avril 2021

Step by step, day by day

 Un pas après l'autre, Anne. Concentre-toi sur tes pieds, le droit qui dépasse le gauche, le gauche qui rattrape le droit. Comme ça. Petit à petit. 

Une chose après l'autre, me souffle ma conscience. Alors que mes pensées se déchaînent et hurlent en arrière plan. 

Les larmes se dévalent et le gouffre se crée, tu sais ce trou noir du plexus qui aspire tout jusqu'à se manger lui-même. Pas après pas, Anne. C'est la seule réponse qui me vient lorsque j'ai envie d'en finir avec toutes ces histoires d'existence.

Comme l'impression que l'erreur dans la matrice c'est de vouloir voir trop loin trop large tout le temps. Qu'on est conçu pour anticiper sur une certaine distance et qu'au delà, les effets bénéfiques de la projection s'inversent, que c'est la boite de pandore qui nous tombe sur la tronche et son bordel incommensurable dont il est impossible de s'extraire.

Prendre le jour tel qu'il vient. 

Ca commence à se compter en années, et toujours pas vu le soupçon d'une lumière. 
Il est où le bout de ce foutu tunnel ? 

Je suis fatiguée. 
Fatiguée de patauger dans le noir, sans idée de s'il existe une solution à mon trouble, de si je trouverai un jour l'étincelle d'un nouveau sens à ma vie et de si ce jour est programmé pour ce temps d'existence qu'il me reste.

Je n'espère plus.
J'ai démoli trop fort les fondements de mon esprit.
Cela me rend plus perspicace, plus pertinente. 
Et en même temps, profondément inutile.

Est-ce que ce temps là se rattrape ? 
Je ne suis même pas à la moitié de mon espérance de vie. Pourquoi suis-je déjà si épuisée d'avoir essayé ?
J'ai tellement essayé. 
Je n'en peux plus. 

Est-ce qu'il ne faudrait pas se rendre à l'évidence ? 
T'as fait ce que t'as pu, Anne. T'as tenté ta chance maintes et maintes fois. T'as choppé les mains qu'on te tendait, tu t'es laissé tenter par les heureux hasards parce que tu ne voulais pas te laisser aveugler par une vision trop étriquée de tes rêves, parce que tu sais que tu ne peux pas tout savoir. T'as essayé de développer tes points forts, t'as bossé d'arrache pied sur tes points faibles, tu t'es débarrassée des démons de ton enfance, des croyances et concepts qu'on avait gravé sur ton image, tu t'es questionnée, t'es allé chercher tes véritables envies et besoins, tu les as comparés avec ce que t'avais déjà construit et ce en quoi tu plaçais tes efforts, tu t'es entraînée à les exprimer au plus juste, t'as cherché la justesse, toute ta vie t'as cherché la putain de justesse, dans tes actes, dans tes mots, en cohérence avec tes valeurs, t'as remis en question ce que tu pensais vrai, ce que tu pensais bon et mauvais, tu t'es demandée pour toi ce que c'était être un adulte ou même juste, un être humain et qu'est-ce que ça t'a apporté ?  L'envie d'en finir ? 

C'est ça, la réponse ? 
Ce jeu de la vie, il est vraiment nul. Il est pas fun quand t'as pas les bonnes cartes en main et plus t'avances dans le jeu, plus l'écart se creuse et à quoi bon si on prend aucun plaisir avec ces règles à la con. J'ai envie de balancer la table et mes cartes contre le mur tellement je suis énervée, je suis pas compétitrice, je me bats contre personne, je veux juste un tant soit peu y trouver un sens. 
Mais j'ai beau chercher. 
Et je vous jure, je cherche.

A quoi bon tout ça. 

Un pas après l'autre, qu'elle disait la petite voix de mon cerveau.
C'est le seul argument qu'elle ait trouvé pour que je ne me flingue pas ici et maintenant.