mercredi 2 mars 2016

Tive Razao

Ça y est, j'ai la nostalginite qui me reprend.
Plus de dix ans.

Une décennie bien entamée que je déverse ma petite vie sur les toiles anonymes.
Wow.

Y'a tout là dedans.
Un bloc compact d'existence.
Dans la petite boite.
Entre les lignes, des morceaux de sensations palpables pour celle qui les a déjà tenus au creux de son poignet. Dix années, merde.

Comme on vit plus pareil.

Comme les voyages se passent différemment.
Et le temps n'est plus le même.

Tu sais, quand tu cherches l'instant le plus fort, le présent indélébile, et tant pis si l'on crève dès demain. Quand tu veux voyager plus loin, toujours plus loin, dans le danger de l'inconnu, quitte à se laisser des traces, et pas des plus belles. Parce que le beau a une autre valeur.

Tu sais, c'est un peu le propre de la jeunesse.

Ensuite, on court après d'autres choses.
Ensuite, ce n'est plus le sens de la vie que l'on cherche.
C'est la place que l'on s'y donne.
C'est s'y implanter.
Ce n'est plus se laisser des traces sur la peau, c'est laisser une trace. Juste.
Tu sais.

Mais ce soir, j'ai la nostalginite qui refait surface à l'orée du printemps et j'écoute Seu Jorge en me remémorant nos voyages dans la ville. Nos danses spontanées. Ton sourire. En haut de la Bastille, ton premier regard. Les lettres inespérées.

Qu'est-ce que tu me manques.

Qu'est-ce que je me sens loin.

Comment a-t-on pu laisser s'enfuir cela, dans ce quotidien traitre, et la volonté de ranger pour grandir, de se ranger, nous même dans une case, comment a-t-on pu laisser filer cela sans réagir, sans se rebeller, contre nous-même et ce lien qui se distend à force de tirer, laisser les choses s'étirer d'elles-même, comme le temps. Et le silence.

C'était un amour véritable.

C'était une bouffée d'air frais et un tour de magie, les moments que l'on s'accordait à deux. Mon ami, c'était un pansement, un peu d'eau et d'engrais sur le cœur à chacune de nos rencontres. C'était pur et profond, ce qui nous tenait unis et je pensais que c'était indissociable. Je pensais que la qualité de nos souvenirs ne nous laisserait jamais creuser l'écart. Ou le doute.
Je pensais que c'était essentiel, et nécessaire.
Que se voir, c'était.
C'était. Comme un état d'être. Comme ce qui existe de soi.
Comme le fait de respirer.

Je croyais.

Je repense à nos marches bras dessus bras dessous, à nos chants qui résonnent dans les grands couloirs souterrains des métros parisiens.
Peut-être que c'est ça, dans le fond.

Qu'aujourd'hui, nos chants encore résonnent.
Mais qu'avec les obligations de la vie, ils demeurent souterrains.

Qu'on les entend plus vraiment parce que tu comprends, on est des gens occupés, occupés à compter ce que l'on donne et à prendre nos responsabilités d'adultes au sérieux.
Or, même si l'on n'entend plus les sons, ça continue de vibrer.
Par secousses, ça nous rappelle.

Il y a des musiques qui ne peuvent s'oublier.