vendredi 19 septembre 2014

Entre quatre yeux et un bouquet champêtre

- C'est une bien jolie table que tu as là.

Les deux mains de cette idole de chanteur appuyées sur celle-ci, face à moi, les yeux rivés.
Il renchérit :

- Et sinon, tu chantes?
Regard écarquillé.
- Bah....hmm....ouuui...?
Il rit.
- Je veux dire, tu fais des concerts en ce moment?
- Ça m'arrive.
- J'aimerais bien venir t'écouter chanter.

C'est mon idole de chanteur.
De sa bouche, entendre qu'il aimerait venir à un de mes concerts.
C'est le monde à l'envers?
Moi qui me suis tapie dans son public une bonne dizaine de fois, dans quelques recoins de France...
Je crois rêver. Je lui demande :

- Tu es libre en journée?
Il me répond par adverbes, en hochant de la tête vivement :
- Complètement, je suis complètement libre!
- On se voit alors?
- Mais carrément!

Ça a l'air si simple. Alors qu'avant. Avant.
2010.
Déjà...
Je chiais dans mon froc.
T'arrivais devant moi, je partais en courant.
On se regardait dans le blanc des yeux pendant des minutes entières et ce n'était pas un ange qui passait, c'était un élevage non, un troupeau. Le soir, quand je rentrais pleine de remords, je t'écrivais des lettres envolées. C'était ridicule. Qu'est-ce que j'en ai couchées, des déclarations perdues dans l'amer, les échecs de ces pas qui ne se faisaient pas, pétrifiés par ma gaucherie. Ma conviction que je ne pouvais pas t'intéresser, toi le beau, l'inspiré, le solitaire, le poète romantique plein de sarcasmes, de folie et moi, la groupie transie.

Un premier rendez-vous manqué à l'aube d'un train qui est arrivé à l'heure.
J'ai mis trois ans avant d'oser te renvoyer l'invitation.
Rappelle-toi, le cœur sur l'estomac, j'en ai vomi d'incertitude juste avant notre première rencontre en tête à tête. A t'asséner sans cesse des vents minables, parce que j'y croyais pas moi-même. A tout ça. A ce truc.
Aujourd'hui, je suis quand même bien contente de ne jamais t'avoir cédé qu'un seul baiser dans le cou.

Parce que bon.

C'est beau les rêves. Mais le vide de l'irréel, ça nourrit pas son homme.
Franchement, tu m'as rendue malade.
Malade d'amour.
Tu m'as rendue inconsistante, faiblarde, complexée. Si petite en ta présence.
Avoir pu te parler hier comme à quelqu'un de normal, si tu savais.
A quel point c'est une respiration.
Une victoire sur mes doutes.

Et demain, près du canal de l'Ourcq...
Je suis à Paris...

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