mardi 18 mars 2014

Emportée par la foule et des mains qui s'attrappent 1/2

Je me rappelle, c'était un peu avant Noël sur la capitale.

Une tonne de mois que je n'avais plus visité Paris. Il m'avait dit, "amuse-toi là bas, ne te retiens pas pour moi alors que je ne peux t'apporter l'amour que tu recherches".  J'avais pensé, encore ce manque de confiance en soi biaisé par une forme équitable d'échange. Quand mon sorcier bienveillant m'avait posé la question "et si jamais il devait y avoir quelqu'un d'autre après moi, tu verrais qui?" je lui avais répondu sans détour ni hésitation le prénom de ce garçon à la rencontre atypique. Je lui avais raconté le coup des bras tendus pour pleurer, et aussi de comment ça c'était fini, c'est à dire du jour au lendemain, un bon coup du lapin sans aucune excuse et plus de nouvelles avant son départ pour la Californie. Puis je m'étais ravisée. Même s'il me plaisait plus que les autres et qu'entre temps par de longues séries de mails nous nous étions platoniquement rabibochés, je ne crois pas pouvoir construire quelque chose de sérieux qui tient la route avec un homme pareil.

C'était un peu avant Noël donc.

Mon garçon des étoiles, ex amoureux avec qui je devais partager un an de ma vie en Australie avait pris un sursis en France de deux semaines. Nous nous étions vus une soirée dans le sud et promis que nous nous reverrions avant son départ lors de la crémaillère parisienne de cet ami commun danseur manouche qui nous avait réuni, à l'époque. Soirée déterminante, puisqu'était également revenu de Californie ce type et cette histoire de sanglots dans des bras qui ne se sont pas ouverts. Deux ans d'intermède au milieu. J'appréhendais. J'en avais parlé à mon sorcier bienveillant, qui m'avait alors lancé la fameuse : "amuse-toi là bas, ne te retiens pas pour moi alors que je ne peux t'apporter l'amour que tu recherches". Ce n'était concrètement pas mon but. Et en même temps.

Il s'était avéré que lors de ces deux années, mon garçon des étoiles et ce type aux larmes non embrassées s'étaient découvert une passionnante amitié respective, et qu'avec mon ami danseur manouche, ils formaient un trio incomparable. J'avais une histoire (plus ou moins amoureuse) avec chacun et bien que sincère et vraie, je redoutais les petits conflits d'égo.

Il n'en fut absolument rien.
Tellement rien que c'en était presque étonnant. Le danseur manouche valsait d'une convive à l'autre (après tout, c'était sa soirée) et se préoccupait avec sa compagne du bien-être de tous, le garçon des étoiles et moi-même nous liguions d'un commun accord contre le reste du monde dans des débats enflammés et ça faisait du bien de retrouver un allié d'une telle qualité d'esprit et de coeur. Quant au type aux larmes non embrassées, il m'ignorait, et n'était pas venu me dire bonjour. Pas plus mal. Rustre, mais pas plus mal.

La cuisine-salon s'était métamorphosée en une énorme piste de danse contact, où chaque protagoniste faisait un avec les corps autant qu'avec le mobilier. Les quelques glandus pas habitués à la fusion de groupe se retrouvaient sur le canapé à converser comme s'ils ignoraient délibérément ce qui était en train de se passer juste devant eux. C'est comme ça que je me suis retournée vers lui, assis à côté de moi. Il m'avait ignorée, mais il n'avait jamais été bien loin. Nous nous sourions, tout en prenant de nos nouvelles respectives. Nous causions exploration du soi en observant ce spectacle étonnant des physiques qui se meuvent et s'imbriquent dans une musicalité et une beauté étonnante.

- Ça donne envie, m'enquis-je.
- Qu'est-ce qu'on attend pour y aller?

Il me prit la main, me larguer dans la foule. Mon ami danseur manouche en profita pour rameuter les autres timidement assis, dont le garçon des étoiles et je fermai les yeux. Je m'abandonnai au mouvement et à la vague des peaux qui surfent les unes sur les autres sans jamais s'entrechoquer. Le poids du corps. L'équilibre. La fluidité de certains êtres.

Et une main qui m'attrape.

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