dimanche 11 mai 2014

Hounds of Love

" Hounds of love are hunting me
   I’ve always been a coward
   And i don’t know what’s good for me
"

Ils ne sont pas passés me rendre visite sur le retour du trajet.
La boule au ventre, mais c'est sûrement pour le mieux. Si ça ne s'est pas fait, tout ça.
Je comprends que c'est pour me protéger et me chérir, que mes anges me laissent ce soir seule pour dormir, si après une journée entière de service et de don de soi j'en arrive à ce résultat là. Je comprends qu'il est là le cadeau, la gratitude du retour d'échange. Dans le silence de la non-réponse.

Bien qu'il avait écrit qu'ils m'auraient bien embarquée avec eux si j'avais osé le leur proposer avant leur départ. Tous les trois embrigadés ces jours durant, lui, le contrebassiste et moi, nous aurions passés de courtes nuits. A parler, rire, chanter, danser, faire de la musique, des rencontres, des confessions. Mon amie ayant vue hier une de ses vidéos parlant de son jeu en flash dont tu es le héros s'est tournée vers moi en riant : "ouais bon, c'est toi en homme, quoi". Et ce n'est peut-être pas si faux.

Dans l'obscurité de la salle de concert, nous chantions systématiquement les mêmes voix intermédiaires. C'en était frustrant, d'avoir ces mêmes réflexes intuitifs, temporels et musicaux, qu'il s'est senti obligé de me le faire remarquer, alors que je me forçais à faire taire les ressemblances. C'est aussi lui qui a relevé notre humour commun et particulier, nous félicitant de nous être assis l'un à côté de l'autre lors des repas plan-plan, étant de surcroît notre public respectif le plus adapté. Nous étions à l'écart, en recul, dans un coin de tablée, spectateurs, complices des contextes. Il m'a demandée "Ton copain n'est pas venu, au fait?", comme ça, l'air de rien, de ne pas y toucher, ni manger de ce pain là. Mais est-ce qu'on continue de nos jours à employer "ton copain" pour signifier "ton pote" ou "ton ami"? Est-ce que le synonyme s'emploie encore auprès du sexe opposé sans être définitivement connoté? 

Je me remémore les phrases, les épisodes.
Ses yeux.
Je crois que ça faisait longtemps qu'un homme ne m'avait pas permis de réellement le regarder dans les yeux. J'en avais pleuré, à l'époque. Qu'ils me le refusent, même mes amoureux, même inconsciemment. Que les pupilles se ferment dès la connexion établie. Cette source d'amour infinie qui m'eut mené à une jouissance universelle, me laissait devant la porte close des recalés d'office, pour des raisons toutes plus impalpables les unes que les autres. Parce que j'étais la sorcière qui s'emparait de leurs âmes, les envoûtait, les volait de leurs biens les plus précieux.

Lui, ces soirs là, ne craignait pas de plonger ses pupilles dans les miennes. Je les voyais reluire, scintiller alors qu'il me parlait et j'en étais émue, à en baisser le regard.
Je pouvais le voir.
Si je le voulais, je pouvais le voir.
Dans son intégralité.
Dans son intégrité.
Nous pouvions échanger nos vues et les mélanger, nous avions accès libre à nos intérieurs.
Par pudeur, et parce la permission n'avait pas été fondamentalement donnée, j'ai laissé ce qu'il était à lui-même. Je n'ai pas fouillé son intimité à travers les fenêtres de l'âme parce que nous n'avions pas encore établis ce lien qui l'autorise. Mais. J'ai été tellement heureuse de réaliser qu'il m'en donnait la possibilité. Qu'il ne me l'interdisait pas. Pas comme les autres.

Je repense à ces derniers soirs, oui.
A tous ces trucs qui s'envolent.
Les papillons, vers des cieux qui se recréent.
Je suis libre de m'éprendre à nouveau.
Encore et encore, recommencer.
Ce n'est plus si décourageant.
Désormais.

En rentrant de ce voyage, je suis passée devant la vitrine de ma voisine qui chantait des bhajans. Je me suis arrêté un instant chanter avec elle. Elle m'a alors raconté qu'ici il suffisait de formuler un souhait pour le voir s'exaucer. Qu'aujourd'hui, la jeune fille qu'elle hébergeait avait émis le vœux de retrouver sa grand mère sans nouvelle depuis 6 ans, et que celle-ci avait appelé dans la journée.
Je me suis mise debout, ai levé la main au ciel, déclamer :

- J'aimerais bien trouver un amoureux.

Ma voisine a fait les gros yeux :
- Tu n'es plus avec ton sorcier bienveillant?
- Non, ça fait plusieurs mois déjà.
- Ah booon! Je ne savais pas! Mais tu sais, ici, il y a plein d'hommes qui demandent après toi. J'en ai déjà rembarré trois à qui j'ai dit que tu n'étais plus un cœur à prendre...

Voilà.

Morale de l'histoire. Pourquoi se limiter?
Il n'y a jamais qu'un seul choix.
Un seul amour.
Une seule emmerde.
On pense refermer devant soi l'unique porte disponible.
C'est parce que tant qu'on la regarde, on ne voit qu'elle.
Renoncer à quelque chose, n'est-ce pas garder de la place pour autre chose?
Faire le vide, le débarras, pour pouvoir accueillir?

J'aimerais bien trouver un amoureux.



Hounds Of Love by Eivør Pálsdóttir on Grooveshark

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