dimanche 5 juin 2022

Gillet rose

Je passe mes journées en compagnie d'une boule de chaleur vivace logée au creux du plexus. Elle est là, elle tourne sur elle même et cherche à sortir lorsque j'ai le malheur de penser à toi. J'ai l'impression que c'est tous ces "je t'aime" qui n'ont pas trouvé destinataire et qui se sont regroupés entre eux pour monter une sorte de syndicat des "je t'aime" non avoués, compactés en une masse intense et impatiente, et qui poussent comme un foret contre les parois de ma poitrine, me transperçant de l'intérieur tant que je ne n'aurai pas rétabli "l'ordre naturel des choses". Parfois ils m'entraînent malgré moi, et je commence à concevoir des phrases à t'envoyer par texto qui clameraient la puissance de mon émoi, puis je réalise que c'est dans ma tête, que mes "je t'aime" me font perdre les pédales et me lobotomisent à l'usure de leur existence. A l'intérieur, c'est une manif qui ne cesse de s'accroître avec le temps et les entrevues, je les entends piétiner et se révolter en brandissant leurs petits panneaux "je t'aime, je t'aime", récupérer quelques pavés des marches de mon coeur pour me les balancer à la cervelle mais jusqu'alors, ma raison a toujours tenu tête, non sans risquer parfois de plier.

Je ne suis pas fermée aux pourparlers mais c'est souvent mon éthique qui clôt chaque débat. On ne négocie pas avec l'éthique. Cependant, mes "je t'aime" sont en supériorité numérique et les forces de "l'ordre naturel des choses" ont de plus en plus tendance à se ranger de leur côté, rendant leurs revendications intimidantes, voire oppressantes. Ils veulent passer aux aveux. Ils n'ont rien à faire du bon timing. Ou du respect des contextes. Tout ce qui les intéresse, c'est dire. C'est vomir leur attirance. Plus qu'un besoin, une question de survie.

Cette guerre civile battant son plein en intérieur, je ne tiendrai pas très longtemps. Je me laisse un mois avant de flancher sur mon programme et mes objectifs. Je ne voulais pas en arriver là, mais si ces "je t'aime" continuent à semer la zizanie en mon esprit, je n'aurai pas d'autre choix que de m'armer de courage, expulser les mots et les sentiments là où ils sont nés parce qu'après tout, je ne suis pas là pour accueillir tout l'amour du monde...

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Du temps à tuer?