jeudi 20 juin 2013

Cyprès, bien que.

Beaucoup de choses à dire. Beaucoup de choses à vivre. Le temps est insistant dans sa sale manie de filer à toute vitesse. Pause. De trois quart d'heures. Moins, peut-être. Pause. Regarder en arrière. Regarder devant soi. Où suis-je? Dans quel état j'ère?

On m'a demandé de visualiser un endroit tranquille, prendre un certain chemin, mon chemin.
C'était un grand champ de blé doré au pied d'un arbre centenaire, et moi dessous. L'allée de terre ocre se frayait entre les tiges, comme Moïse écarte la mer. C'est étrange. Pourquoi le blé? Je fais pourtant des réactions allergiques lorsque ma peau frôle ses épis.

Peu importe.

Il y a son petit cyprès qui gangrène sur la table à manger. Et qu'est-ce qu'on s'était dit?
Qu'on penserait l'un à l'autre lorsque l'on arroserait ses racines. Ça ne fait que deux mois. Pourquoi meurt-il?
Parce que je suis constamment là?
Parce que je ne lui laisse pas suffisamment d'air pour croître, que je prends sa place au soleil? Qu'à force de monopoliser les regards, sous nos yeux pourtant, nous oublions de le nourrir?

Son petit cyprès à la feuille si verte est en train de devenir taupe.
Je me demande comment se porte le mien, moi qui ne suis pas rentrée depuis samedi dernier.
J'ai peur à mon retour de tomber nez à nez avec ses branches maigres et fanées. Son corps recroquevillé, son âme morte. Et le fantôme de son odeur. J'ai peur comme toujours d'essorer trop fort l'amour, jusqu'à la dernière goutte. J'ai peur de grimper trop vite à des ciels excessifs et me rendre compte trop tard de ma cadence folle. De ma passion exponentielle qu'au bout d'un moment, on ne peut plus suivre. Même si on le souhaite. Même si on m'aime, d'une même valeur. Je pleure sur cette tornade créée de mon élan qui n'avait qu'un but pourtant. Exprimer le sentiment. L’alimenter, le faire vivre, le transmettre dans son essence la plus condensée, la plus vibrante. J'ai soufflé sur les braises pour les faire grandir. Et qu'ai-je récolté? La tempête invisible. L'ouragan de tendresse. L’incendie de nos cœurs qui se consument d'un désir incoercible. Que nous restera-t-il une fois nos terres brûlées en leur totalité? Une fois nos êtres réduits en cendres? Seront-nous utiles à quoi que ce soit? Nous seront-nous véritablement unis l'un à l'autre? Est-ce cela, l'amour véritable? Deux dépouilles carbonisées, méconnaissables?

Je t'en prie. Non. Je nous en prie, prenons soin de ce temps à s'apprendre, même s'il court plus vite que nous. Prenons soin de s'attendre, même si l'amour que l'on se voue nous emporte loin du raisonnable. Même si l'ardeur de nos corps bruts dévore par les flammes remords et culpabilité. Arrosons-le.
Prenons soin du cyprès.

Ensemble.

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Du temps à tuer?